Maisons rurales du Cantal

De Maisons Paysannes de France
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Maison paysanne dans le Cantal

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal

Contexte géographique

Département du Cantal

Géologie du Cantal

Carte du Cantal

Dessin Pierre Moreau © 1975
La géologie et les sols du Cantal possèdent une diversité, unique en France. On distingue trois types géologiques, s’échelonnant de 1858m d'altitude (Plomb du Cantal) à 200m environ (vallée du Lot):
  • Pays volcaniques : plateaux basaltiques du Cézallier et de l'Aubrac ; massif cantalien ("strato-volcan", empilement de laves et projections variées) où s'opposent plateaux de forme triangulaire ("planèzes" de Saint-Flour au Sud-Est et de Mauriac au Nord-Ouest) et vallées glaciaires rayonnantes (parmi lesquelles : Cère, Jordanne, Authre, Doire, Maronne, Mars, Allagnon, Brezons, Goul).
  • Bassins sédimentaires argilo-calcaires : bassins d'Aurillac et de Maurs les plus notables, petit bassin de Massiac.
  • Socle ancien (roches métamorphiques et granites) : la Châtaigneraie au Sud-Ouest et la Xaintrie à l'Ouest, plateaux plus ou moins fortement creusés par les affluents du Lot et de la Dordogne. L'Artense au Nord, plateau modelé par les glaces. La Margeride au Sud-Est, important relief soulevé entre des failles ("horst").

Cette diversité géologique se retrouve dans l'architecture qui ne présentera pas les mêmes caractéristiques suivant sa localisation dans la région, bien que le type fondamental d'architecture soit commun. On distingue notamment une variété des matériaux locaux employés, mais aussi une diversité de mise en œuvre de couvertures ou d'ouvertures.

Caractères généraux du bâti paysan

Matériaux et mise en œuvre

Le bâti rural paysan du Cantal est construit grâce à des ressources locales et les matériaux utilisés sont adaptés au climat et au territoire. Toutes les constructions rurales respectent certaines règles de mise en œuvre de ces matériaux bien que le résultat architectural soit différent en fonction de l'emplacement dans le département.

Mur

Mur en pierre

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal
Les murs sont en pierre :
  • dans le massif cantalien : moellons de basalte, de laves diverses et particulièrement de brèche volcanique ; encadrements taillés dans des laves massives (trachy-andésite grise). On note parfois l'emploi direct des prismes hexagonaux de basalte, entrecroisés pour former les arêtiers.
  • dans les pays schisteux : en l'absence de lave ou de granite proches, les encadrements sont en bois. Des maçonneries en colombage, en général réservées à l'étage et alors souvent partielles, apparaissent dans ces derniers pays, en Châtaigneraie (Sud-Ouest) principalement.
Recommandations[1]
  • Les murs sont de préférence en maçonnerie, en pierres sèches ou recouvert d'un enduit à la chaux aérienne et au sable de pays non traité ou coloré.
  • Lorsqu'un enduit est appliqué sur le mur, celui-ci possède des joints beurrés (appelés aussi à pierres vues), c'est à dire que l'enduit recouvre le mur au ras des pierres, laissant apparaître celles qui dépassent. Cependant, cet enduit est fragile et son isolation est faible[2].
A éviter
  • Les joints ou enduits des murs ne doivent pas être réalisés en ciment. Les joints ne doivent pas être creux ou "à la fourchette" (en saillie).
  • Les pierres ne sont pas toujours apparentes

Toit

Bolet

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal
Doucine sous une toiture dans le Nord Cantal

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal
Souche de cheminée dans le Nord Cantal

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal.

Les toitures type de l'habitat rural cantalien sont réalisées grâce à des matériaux du pays: chaume, ardoise, lauzes ("tuiles de pierre") et parfois tuiles de terre cuite. De l'extérieur, la façade est basse et chapeautée par une haute toiture pentue (pour ne pas retenir la neige). Celui de la maison élémentaire est souvent à deux pentes et surmonte directement le rez-de-chaussée composé bien souvent d'une pièce unique.

Bien que la plupart des toiture en chaume aient disparues dans les années 1970 il subsiste parfois un pignon à redans témoignant de cette ancienne couverture et la maison s'accompagne alors d'une charpente rudimentaire. Elles sont renforcées dans le cas où la couverture est remplacée, notamment lorsqu'elle est recouverte d'ardoises ou de lauzes qui sont clouées (ou autrefois fixées par des chevilles en bois) sur des voliges.

Les ardoises proviennent de Corrèze Travassac et Allassac et les lauzes sont quant à elle d'origine métamorphique (schiste, micaschiste ou gneiss) ou d'origine volcanique, aux formes généralement plus irrégulières : phonolite (Nord Cantal), trachy-andésite (coeur du massif) ou basalte en dalles (planèzes). Elles sont taillées en écaille de poisson.

Les faîtages les plus courants sont réalisés en tuile canal. Cependant, il existe encore des faîtages en pierre, parfois accompagnés de croix et d'épis eux aussi en pierre (dans le Nord Cantal).

Une corniche en pierre en doucine (moulure travaillée en forme de "S") termine un mur gouttereau (en fin de pente de toit). Dans l'Ouest cantalien, le toit peut déborder vers l'avant, soutenu par des corbeaux en bois plus ou moins travaillés. Cette architecture peut évoluer pour aboutir au dispositif du bolet, avancée du toit soutenue par des poteaux en bois ou en pierre.

La toiture se développe et devient souvent à quatre pentes dans les maisons plus importantes et/ou les plus récentes. Les souches de cheminée sont particulièrement soignées : de plan rectangulaire, en pierre de taille (brèche ou lave massive) avec leurs retraits caractéristiques elles sont emblématiques de l'architecture rurale cantalienne. Des souches arrondies subsistent, considérées comme plus anciennes et de tradition médiévale. Les souches sont moins soignées dans les pays réduits à employer le schiste.

Sur les toits pentus, les lucarnes sont obligatoires. Elles sont soit en pierre au droit du mur, soit en bois et parfois placées à plusieurs niveaux du toit suivant l'importance de la maison. Ces lucarnes sont couvertes de deux ou trois pentes. De petite dimension, elles servent à aérer les greniers.

Recommandations
  • Les toits doivent être à deux ou quatre pentes.
  • La charpente doit être assez solide pour supporter une toiture en ardoise ou lauzes.
  • Les cheminées sont généralement travaillées, réalisées en pierre de taille ou lave massive et sont plus ou moins enduites.
  • Le coyau de toiture (ou celui des lucarnes) est à conserver afin d'éloigner la neige ou la pluie des murs.
A éviter
  • La pose de gouttière.
  • Les éléments préfabriqués et modernes qui raidissent la toiture.
  • Les grandes lucarnes.

Architecture

Salle commune type d'une maison cantalienne avec souillarde et grande cheminée

Dessin Pierre Moreau ©
L'architecture des habitations cantaliennes présentent des aspects bien divers dépendant de leur environnement et des matériaux utilisés. Il existe néanmoins un archétype du bâti de maison paysanne (appelée aussi oustal), dans la région, encore assez fréquent dans l'Ouest cantalien. Malgré un aspect extérieur différent, il est possible de trouver des similarités dans les matériaux et l'organisation des espaces intérieurs. Située la plupart du temps à l'abri d'un relief, la maison tourne sa façade percée vers le Sud. Son plan est celui d'un rectangle peu allongé (les dimensions intérieures de la salle unique sont de l'ordre de 7m sur 6m). En façade, sa disposition type serait ainsi : une porte à droite et une petite fenêtre à gauche, cette dernière étant proche de la cheminée (appelée aussi "cantou") elle-même adossée au pignon Ouest. A l'intérieur, cette cheminée dispose soit d'un linteau en bois droit soit d'un linteau en pierres taillées en arc surbaissé.
Souillarde

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal.

La souillarde, petit renfoncement voûté aux étagères en pierre, est caractéristique de la maison de Haute-Auvergne. Elle sert de lieu de réserve ou pour y faire la lessive et renferme une pierre d'évier.

Ce renfoncement intérieur se situe généralement sur le mur gouttereau arrière mais il arrive aussi qu'il soit placée à côté du cantou ou en façade. Le développement de la souillarde est caractéristique : elle devient une véritable pièce, dont la présence se signale davantage à l'extérieur grâce à un toit pyramidal souvent spectaculaire, spécialement dans l'Ouest cantalien.

Dans certaines maisons de maître se trouvent également un potager, placé dans un renfoncement près de la fenêtre ou dans une niche de la cheminée. Il permettait de maintenir les aliments au chaud.

Le sol de l'habitation peut être en terre battue, en plancher ou en pierre. Sur cette dernière disposition, des dalles plus moins régulières sont posées, ou alors des galets ou petites pierres rectangulaires posées sur chant forment des calades.

L'évolution architecturale de cette maison se manifeste par la transformation du plan et l'apparition de pièces supplémentaires. On constate ainsi l'apparition de la «chambre » à côté de la salle commune et la possibilité d'un doublement de la maison en profondeur par l'ajout d'appentis (petit bâti avec toit à une seule pente) à l'arrière. La maison peut également posséder un étage voué à l'habitation, alors desservi par un escalier intérieur perpendiculaire au mur gouttereau.

Linteau gravé à Saint-Martin-Valmeroux

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal.

En Haute-Auvergne, jusqu'au milieu du XXe siècle, on constate également que les linteaux sont parfois gravés ou sculptés d'une date, d'un nom, d'initiales, de citation ou de symboles.

Mobilier

Potager permettant de maintenir les aliments au chaud.

Croquis de Claude Gauthier ©
La maison paysanne du Cantal possède un mobilier typique qui renforce la spécificité de son architecture. L'intérieur type comporte une grande table à tiroirs, accompagnée de ses bancs massifs et disposée dans l'axe de la fenêtre. Cette table est surplombée par une planche (la «pau») fixée au plafond par deux montants verticaux et qui sert à ranger à l'abri des rongeurs certains aliments dont le pain.

Deux bancs (dits « de cantou ») sont disposés à l'intérieur et de part et d'autre de la grande cheminée, âme même de l'oustal.

Banc coffre.

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal.

Près de la souillarde, se trouve souvent une fontaine-lavabo en cuivre, fixée à un meuble-support. Le mur du fond est occupé par une pendule, des armoires et surtout par une enfilade de lits clos, ou lits-wagons. Ces lits ferment par des rideaux et non des portes, contrairement aux lits bretons. Ils sont précédés chacun de leurs bancs-coffre, parfois d'un seul tenant pouvant atteindre jusqu'à 5m de long.

L'intérieur était éclairé par des lampes à huile, dont une suspendue au-dessus de la table par le « porte-chaleil », sorte de crémaillère en bois plus ou moins ouvragée.

Diversité architecturale

Le Cantal recèle une architecture diverse représentative de son territoire tout aussi varié. Le site de la délégation Maisons Paysannes du Cantal en présente de nombreux exemples au travers de sa page "Visites virtuelles de pays de la Haute-Auvergne" consultable ici.

Bâtiments annexes

L'habitat rural cantalien est bien souvent accompagné de bâtiments annexes qui sont des témoins majeurs du patrimoine architectural rural de la région. Pourtant, ces constructions sont menacées car peu protégées.

Parmi ces annexes, on compte principalement des granges-étables qui font soit corps avec l'habitation dans l'Est cantalien, soit qui y sont perpendiculaires, soit qui en sont séparées à l'Ouest du département. Les porcheries, poulaillers et pigeonniers font également partie des constructions composant le bâti rural du département.

L'habitation peut s'accompagner d'un four à pain, d'une fontaine ou d'un puits, ainsi que d'un secadou (séchoir à châtaignes). Quant à ses abords extérieurs, les sols sont parfois aménagés en calade et des murets viennent délimiter la propriété.

Une description plus précises de ces annexes est disponible ici.





Références

  1. MAISONS PAYSANNES EN AUVERGNE, DÉLÉGATION DU CANTAL (2002), L'âme du pays : Comment restaurer une maison cantalienne, Revue Vieille Maisons Françaises, n°194, pp. 56-59. Plusieurs conseils sont décrits dans cet article afin de restaurer une maison ancienne pour y vivre aujourd'hui.
  2. BOCQUET H. (2013), Enduits, joints et mortiers de chaux, une peau pour la maison, fiche technique du CAUE de l'Allier, disponible à l'adresse: http://www.caue03.com/userfiles/files/Habitat/Fiches%20techniques/Enduits%2C%20joints%20et%20mortiers%20de%20chaux/2013-06-06%20Enduits%20-%20Joints%20-%20Mortiers%20de%20chaux%20-%20Une%20peau%20pour%20la%20maison.pdf

Bibliographie