Peinture à l'ocre

De Maisons Paysannes de France
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La peinture à l'ocre (ou peinture à la farine) est une peinture naturelle non polluante. Appliquée sur du bois brut avec des brosses et pinceaux, elle le protège et le rend imputrescible. Cette peinture à l’ocre s’applique également sur les ferrures pour les protéger.

Ouvrant d'église en bois peinte à l'ocre, Eglise Notre-Dame et Saint-Blaise, Montbouy (45) .

Photo Jean-Michel Gelly © Maisons Paysannes de France, délégation du Loiret.

La peinture à l’ocre est écologique, durable et économique si les terres colorantes sont choisies en France et sont uniquement naturelles. En les mélangeant, plusieurs gammes de couleurs sont possibles.

Aujourd’hui, deux régions produisent des ocres servant à la réalisation de peintures : en Provence (sur le site de Roussillon) et la Bourgogne (St-Amand-en-Puisaye). La terre de Sienne est quant à elle produite à Villers-le-Tourneur dans les Ardennes.

Détail du portail et de ferrures peintes à l'ocre de l'Hôtel Dieu, Châtillon-Coligny (45).

Photo Jean-Michel Gelly © Maisons Paysannes de France, délégation du Loiret.

La terre d’ombre, utilisé également dans la peinture, n’est quant à elle plus produite en France.

Une peinture est composée généralement d’un liant (huile, eau, résine, caséine,…), d’une charge (qui donne le corps à la peinture) et d’un pigment. La particularité de la peinture à l’ocre est que la terre colorante est à la fois une charge et un pigment, avec pour liant l’amidon contenu dans la farine et l’huile.

Le pourcentage de terre colorante ou de farine donné influencera l’appellation de cette peinture : peinture à l’ocre, à la farine ou au blé.

Porte peinte avec une peinture à l'ocre.

Photo Maisons Paysannes de France, délégation du Loiret. ©

Composants

Farine : épaississant donnant l’aspect collant à la peinture.

Huile de lin : renforce la peinture, lui permet de résister à l’extérieur.

Ocre : terres colorantes produites après extraction en carrière, lavage, décantation et broyage. En étant calciné, l’ocre jaune devient ocre rouge. Les ocres peuvent toutes être mélangées pour obtenir une gamme de couleurs plus étendue. Les pigments naturels et de synthèse ne peuvent être mélangés dans cette recette.

L'ocre est composée d'argile, de kaolin, d'oxydes de fer (couleur) et de quartz (sans couleur).

Sulfate de fer : sel de fer, appelé autrefois « vitriol vert ». Ce produit aux propriétés antifongique est aussi un conservateur pour la peinture notamment parce qu’il interagit avec l’huile. Il est disponible en jardinerie sous la forme de petits cristaux verts.

Proportions des ingrédients

Il existe des variantes dans la composition de la peinture à l’ocre mais le procédé de fabrication suit les mêmes étapes.

Pour obtenir 5kg de peinture, soit plus ou moins 7L (recouvrant une surface d’environ 15m²) :

Ingrédients recette 1 (Terres et couleurs)

  • 260g de farine (n’importe quelle nature)
  • 3,2 litres d’eau
  • 1kg de terres colorantes
  • 100g de sulfate de fer
  • 0,4 litre d'huile de lin clarifiée
  • 4 cl de savon liquide

Ingrédients recette 2 (Maisons Paysannes du Loiret)

  • 350g de farine (n’importe quelle nature)
  • 3,5 litres d’eau
  • 1kg de terres colorantes
  • 100g de sulfate de fer
  • 0,5 litre d'huile de lin clarifiée
  • 5 cl de savon liquide ou 5 gr de savon de Marseille râpé

Fabrication

Préparation de la peinture à l'ocre.

Photo Maisons Paysannes de l'Orne. ©
Peinture à l'ocre après préparation.

Photo Jean-Michel Gelly © Maisons Paysannes de France, délégation du Loiret.
  • Porter 3 litres d’eau à ébullition. 
  • Délayer la farine dans le reste d’eau froide puis verser le mélange dans l’eau bouillante. Poursuivre la cuisson en mélangeant sans interruption pendant 15 mn jusqu’à obtenir l’aspect et la consistance d’une colle à papier peint. L’amidon contenu dans la farine permet l’épaississement et l’aspect collant de la préparation.
  • Si le produit comporte des grumeaux, il est possible de le passer au mixeur ou bien de la mélanger au mélangeur à peinture s’il y a de grandes quantités.
  • Ajouter l'ocre et le sulfate de fer et tout en remuant régulièrement, laisser cuire pendant encore 15 mn.
  • Ajouter l’huile de lin et faire cuire encore pendant 15 mn en mélangeant toujours et en ajoutant petit à petit le savon qui favorise l’émulsion de la peinture.
  • Après refroidissement, la peinture à l’ocre est prête. Sa consistance est semblable à celle d’un gel mais il est possible de la diluer si besoin avec un peu d’eau.
  • Si toute la peinture n’est pas utilisée, il est possible de la conserver, après avoir versé un peu d’eau salée sur le restant, dans un récipient bien fermé. Ainsi couverte et à l’abri du gel, elle peut se conserver pendant environ un an.

Mélange des couleurs

Il est possible d'agrandir la gamme de couleurs des peintures en mélangeant les terres colorantes entre elles avant cuisson., ou, lorsque les peintures différentes sont réalisées, en les malaxant pour créer une nouvelle teinte.

Application

Application de peinture à l'ocre sur la porte en bois de l'Hôtel Dieu, Châtillon-Coligny (45).

Photo Jean-Michel Gelly © Maisons Paysannes de France, délégation du Loiret.

La peinture se pose sur une surface sèche et non chauffée par le soleil.

Elle s’utilise sur des bois neufs ou anciens, secs, propres, brossés ou poncés et dépoussiérés. Les restes d’une peinture antérieure doivent être éliminés afin de ne pas empêcher la peinture à l’ocre de pénétrer le bois. 

Toutes les essences de bois peuvent être peintes avec cette peinture. Cependant, à son contact, le tanin du chêne ou de châtaigner neuf peut parfois ressortir. Un décapage du chêne par bains doit être évité car il fait ressortir le tanin. Il est donc recommandé de laisser le bois se délaver naturellement avec la pluie avant de le peindre.

Les parties métalliques neuves doivent être traitées avec un produit antirouille phosphaté avant application de la peinture tandis qu’il n’est pas nécessaire sur des ferrures anciennes et rouillées sur laquelle la peinture aura une accroche suffisante.

Deux couches de peinture sont nécessaires.

  • La première couche peut être réalisée avec une brosse ou un pinceau (avec si besoin une peinture diluée à 10 ou 20% dans l’eau).
  • Après 1h de séchage, appliquer une deuxième couche. Il est également possible de réaliser cette seconde couche 24h après la première couche.

Le rendu final est mat tout en laissant apparaître le fil du bois. Il est ensuite recommandé de repasser une couche deux ou trois ans après la première peinture, pour une bonne durabilité ultérieure.

Avantages

La peinture à l'ocre, en plus d’être économique, présente de nombreux avantages qui en font un produit de choix dans la restauration du bâti ancien :

  • Non toxique : la peinture ne contient pas de solvant et a donc moins d’impact sur l’environnement qu’une peinture classique.
  • Longévité : elle tient de 5 à 10 ans en extérieur suivant son exposition mais il existe également des bâtiments dont les peintures à l’ocre ont résisté bien plus encore. La peinture ne s’écaille pas mais vieillit par perte de liant en devenant poudreuse. Il suffit alors de la brosser et de repeindre. 
  • Porosité : elle permet de laisser respirer le bois.
  • Fongicide et protège des mousses.
  • Protège des insectes.
  • Esthétique et stable dans le temps : la couleur ne se modifie pas dans le temps grâce aux pigments.
  • Filtre UV naturel : grâce à la grande quantité de pigments minéraux qu’elle contient.
  • Facile d'application : la peinture a une texture facilement applicable et sèche très vite. Elle se rince facilement à l’eau.
  • Ne s’enflamme pas facilement grâce aux pigments minéraux que la peinture contient.

Limites de la peinture aux terres colorantes

  • Les couleurs utilisables sont limitées à une palette des pigments ocre naturels. Il n’y a donc pas de bleu, pas de vert (la terre verte étant trop transparente et peu colorante) ni de blanc (les blancs disponibles ont un pH incompatible avec la recette donnée ci-dessus).
  • Peu adhérente sur les bois exotiques ou rabotés.
  • Par forte pluie, la peinture peut couler. 

Bibliographie

  • BONHOURE S., Fiche technique : La peinture à l’ocre et les menuiseries extérieures, Dossier Soigner sa façade, Revue Maisons Paysannes de France, n°206, 2017. pp.34-35.
  • PONTVIANNE C., Les ocres, A la recherche des véritables couleurs d’un terroir, Revue Maisons Paysannes de France, n°170, 4T, 2008. pp.10-13.
  • PLISSON C., Peinture naturelle à l’ocre (ou peinture au blé), Fiche technique Maisons Paysannes du Loiret disponible à l’adresse : http://www.maisons-paysannes-loiret.org/index.php/mhrestaurer/mh1techniquesmateriauxc/35-peinture-a-locre