Dendrochronologie

Bouquet de chênes en Mayenne

Charpente de la grange de "La Rue" à Avessé (Sarthe) - Photo P. Dejust

====                               Un apport décisif pour la datation des bâtiments anciens. ====  

    Dans un bâtiment ancien la charpente est souvent l’élément qui a été le mieux conservé

même quand le bâtiment a été dénaturé. D ’ou l’importance de pouvoir dater les bois avec

précision .

Définition:

    La dendrochronologie, c’est l’étude des cernes du bois afin de permettre une datation

très précise des bois utilisés dans une construction, le plus souvent une charpente, mais

aussi les pans de bois d’une construction en colombage, un plancher, une pièce

archéologique etc .

Une méthode de datation.

    En l’absence d’archive, un bâtiment était jusqu’alors daté de façon approximative

et à vrai dire un peu empirique, d’abord par sa silhouette, son aspect extérieur, sa charpente

et avec un peu plus de précision par ses éléments décoratifs, son ornementation qui

déterminent une époque correspondant à un style. Mais en dehors des monuments

prestigieux, la mode était souvent suivie avec plus ou moins de décalage dans le temps

(exemple une cheminée Régence réalisée à la fin du 18 ème siècle). Sans parler des

réemplois courants.

    Les dates gravées qui semblent apporter une réponse précise sont à prendre avec

beaucoup de précaution. En effet, si c’est une pierre isolée insérée dans la maçonnerie,

il s’agit peut-être d’une réutilisation. Si la date est gravée dans un élément inamovible

(charpente , noyau ou structure d’escalier), c’est peut-être quand même une date apocryphe*

qu’un occupant a gravé pour se faire plaisir ou sur la foi d’une information erronée (souvent

liée à une construction antérieure ). C’est peut-être aussi la date de travaux d'un remaniement.

    La dendrochronologie a permis dans bien des cas de déterminer à l’année près la date à

laquelle les bois ont été abattus. Il est attesté qu’autrefois les bois de charpente, pour des

questions de facilité, étaient pratiquement toujours travaillés aussitôt après l’abattage sans

attendre le séchage et donc le durcissement, et utilisés (manque de bâtiments de stockage ).

    Suivant les aléas climatiques, les cernes annuels de croissance des arbres sont tous différents

d’une année sur l’autre. Quand le climat est favorable le cerne est large, et quand le climat est

défavorable le cerne est petit. Et même pour des cernes de largeur égale, leurs caractéristiques

sont différentes suivant les variations du climat au cours de l’année. Ces variations de largeur

des cernes et ces différences lors de leur formation permettent d’obtenir une sorte de “code barre”

exploitée en informatique.

    Pour la dendrochronologie, on réalise dans le bois un carottage au moyen d’un foret creux, ce

qui permet de comparer, bien sûr au moyen de matériel perfectionné, en laboratoire, cet

échantillon avec une banque de données informatiques regroupant un grand nombre de références

datées.

    Si le carottage prélevé comporte tout l’aubier jusqu’à l’écorce, la datation sera très précise :

nous aurons l’année d’abattage. Si le prélèvement ne comporte pas d’écorce, la datation pourra

être à 30 années près, puisque le nombre de cernes d’aubier du chêne peut varier de 4 à 34

voire davantage dans 3,5 % des cas.

Exemple de la grange de "La Rue" à Avessé (Sarthe).

    Au lieu-dit "La Rue" à Avessé, il a été réalisé dans la charpente de la grange 14

prélèvements dans des pièces de bois différentes. Cinq de ces prélèvements comportaient un

aubier complet ce qui a permis de déterminer la date d’abattage avec certitude : Hiver 1449/1450 .

Les autres prélèvements avec un aubier incomplet, voire absent, donnent une fourchette dans

laquelle les dates ci-dessus sont toujours incluses ( 1426/1456 ou 1439/1459 ). Il s’avère donc

que l’ensemble de la charpente est homogène et indique une mise en oeuvre en 1450 .

    Avant l’expertise dendrochronologique, la datation que l’on pouvait avancer était prudemment

fin 15ème/début 16ème. Elle se révélait malgré tout inexacte. La précision apportée par cette

expertise est spectaculaire.

    La dendrochronologie a ainsi permis de remettre en cause des datations affirmées depuis des lustres y compris pour des

monuments de premier plan, très connus mais dont les archives ont disparu. 

   * Apocryphe : non authentique