Couverture en bardeau de bois

De Maisons Paysannes de France
Assemblage traditionnel d'une charpente couverte en bardeaux. Schéma Chantal PONTVIANNE ©
Le bardeau est une planchette de bois servant à la réalisation de couverture de bâtiments. Tout comme le chaume, il a longtemps constitué une matière première pour la réalisation de couverture. Abondant dans certaines régions françaises, le bois est facile à mettre en œuvre dans l'architecture et notamment en toiture.

On en retrouve de plusieurs types suivant l'essence de bois choisi et suivant la région où ils sont employés.

Caractéristiques du matériau

Avantages

Réalisé avec des bois de grande qualité, le bardeau présente de nombreux avantages notamment la légèreté, la résistance aux intempéries, aux mousses et à certains insectes. Ce matériau possède également des qualités isolantes.

Fabrication du bardeau

Tous les bois ne se valent pas pour la réalisation de bardeaux car ils ne peuvent être fendus ou débités, c'est pourquoi il faut les sélectionner avec rigueur. Cela entraine en conséquence une déperdition de matière. Les dimensions du bardeau varient suivant la nature du bois utilisé.

La fabrication du bardeau commence par la coupe d'une bille de bois sans fil et nœud, c'est à dire un tronc d'arbre débarrassé de son écorce et de son aubier. On obtient alors des blocs qu'il faut couper en quatre quartiers avec un départoir. On fend ensuite chaque quartier pour obtenir des planches de 15 à 18 mm d'épaisseur.

Abandon progressif

Les couvertures de toit sont de moins en moins réalisées en bardeaux, notamment parce que l'on craint les incendies qui pourraient dévaster rapidement la construction. Les toitures incombustibles les ont donc remplacées peu à peu. Les sociétés d'assurance ont également joué un rôle important dans la dissuasion d'utiliser ce matériau puisqu'elles augmentaient les tarifs de prise en charge d'une telle toiture ou refusaient simplement de les assurer.

Variantes régionales

Les couvertures en bardeaux de bois se trouvent particulièrement dans les régions riches en forêts. Cependant, l'espèce de bois utilisée diffère suivant les régions : les Alpes, le Jura, la Corrèze, la Creuse, la Sarthe ou la Mayenne.

Bardeau de mélèze

Dans la vallée de l'Ubaye, au nord des Alpes de Haute-Provence, on utilise du bois de mélèze afin de réaliser des bardeaux qui viendront couvrir les toitures de la région. Ce bois est choisi en forêt dense afin qu'il soit plus solide, contrairement à celui qui pousse dans les prés et qui est moins dur car son grain est moins serré.

Le bois de mélèze était autrefois cherché en forêt puis scié à la scie de long par les habitants eux-mêmes. Ils réalisaient ensuite les bardeaux avec une scie à cadre puis les stockaient à l'abri pendant deux ou trois ans afin de les sécher naturellement. Il est en effet nécessaire que le mélèze sèche lentement afin que le bois ne se déforme pas. Les bardeaux obtenus étaient ensuite rabotés afin d'être lisses.

Aujourd'hui, on fait appel à des artisans charpentiers-menuisiers pour fabriquer et poser les bardeaux dont le bois sera fourni par des scieries des environs.

Dimensions

Les dimensions peuvent être en moyenne de 30 à 35cm de long pour une largeur de 6 à 12cm. L'épaisseur du bois est également différente suivant son emplacement sur la couverture, allant de 12 à 24mm en bas et de 2 à 4mm en haut de toiture. On trouve cependant des grandes planches pouvant atteindre une longueur de 2 mètres pour une largeur de 15 à 20 cm et d'une épaisseur de 2,7cm.

Pose du bardeau

Outils nécessaires au creusement d'une planche en gouttière. Photo Chantal PONTVIANNE ©

Les toitures de bardeaux de mélèze ont rarement une pente inférieure à 45° et il n'est pas rare de trouver des couvertures dont la pente est très forte, notamment sur les anciennes bâtisses ou les édifices religieux.

La pose des bardeaux commence par la bordure inférieure du toit. Comme illustré sur le schéma de la figure 1, les chevrons sont espacés en moyenne de 50cm à 1m d'axe en axe. Sont ensuite cloués sur les chevrons, parallèlement à la gouttière, des lambourdes dont l'intervalle se situe entre 50cm à 1,40m. On fixe ensuite les bardeaux à chaque bout sur le lambourdage, avec des clous en acier galvanisé. Ces derniers ne doivent pas être trop enfoncé au risque d'écraser le bois. L'écart entre toutes les pièces de bois de la toiture peut varier en fonction du mode de recouvrement choisi et de la dimension des bardeaux.

Il est nécessaire que les joints entre les planches soient décalés à chaque rang afin d'obtenir une étanchéité efficace. Soumis à des variations hygrométriques, les bardeaux de mélèze doivent être espacés lors de la pose, afin d'éviter leur chevauchement. Cela favorise la ventilation et évite le pourrissement des bardeaux. Ils sont aussi rabotés afin de faciliter l'écoulement de la pluie et le bas de la planche est retaillée en biseau afin de ne pas retenir l'eau.

Technique de coupe et raccords de toiture

Gouttière en mélèze suspendue Schéma Chantal PONTVIANNE ©
Le bâti couvert et les bardeaux utilisés impliquent une forme et une pose spécifique. Voici leurs caractéristiques:
  • Le faîtage est réalisé d'une manière similaire à celle d'une toiture en ardoise, c'est à dire en lignolet. Le dernier rang des bardeaux est cloué sur les lambourdes et déborde de 15 à 25cm du côté des vents dominants. Le haut des bardeaux du versant opposé vient s'accoler sous les bardeaux débordants.
  • les arêtes en bardeau de mélèze sont réalisées de la même manière que les faîtages, à savoir en lignolet.
  • l'abergement autour d'une cheminée est réalisée avec quatre pièces de tôles façonnées, (une bavette de façade, deux bavettes latérales et une bavette sur l'arrière de la souche) et est posé soit en recouvrement, soit dans l'épaisseur de la toiture afin d'être le plus discret possible. Il est maintenu par des petites pattes métalliques qui sont clouées directement sur les bardeaux. Le tout est recouvert d'un solin métallique fixé à la souche de la cheminée et est recouvert d'un mortier de chaux naturelle et de sable local.
  • la gouttière est réalisée en bois de mélèze. Un long tronc de bois très droit est sélectionné puis creusé à la main avec des outils spécifiques afin d'en faire une gouttière. Elle est ensuite suspendue à l'aide de crochets en bois qui sont cloués sur le côté des chevrons.

Bardeau de châtaigner

Le châtaigner se trouve naturellement en Corse, dans les Cévennes ou encore dans le Var, notamment dans le massif des Maures où il pousse de préférence sur les sols granitiques ou siliceux. Peu présent dans le nord et l'est de la France, où les hivers sont rigoureux, le châtaigner est surtout produit dans le Limousin, le Poitou, le Périgord, les Cévennes, l'Isère, les Pyrénées Orientales, la Bretagne et la Corse.

Cette essence de bois est résistante en raison de la présence abondance de tanin et est souvent comparée au chêne. Cependant, son aubier, partie jeune et périphérique du bois, est plus fine et facilite son usage en bardeau.

Pose du bardeau

Mode de recouvrement en bardeaux de bois et clouage. Schéma Chantal PONTVIANNE ©

Le recouvrement de toiture en bardeaux de châtaigner suit plusieurs étapes. Dans un premier temps, une sous toiture est réalisée, sur laquelle seront posés les bardeaux. Elle peut être réalisée avec des panneaux de particules, des voliges ou encore des liteaux en sapin ou peuplier cloués ou chevillés sur les chevrons de la charpente.

Les bardeaux de châtaigner sont préparés avant la pose, en perçant des avants-trous pour éviter que le bois ne se fende lors de la fixation.

Tout comme les toits en ardoise ou en tuile plate, le bardeau est posé suivant un recouvrement au tiers. La partie dégagée est appelée pureau. Il y a donc un tiers de pureau apparent, un tiers caché et un tiers de recouvrement pour chaque bardeau. L'espace minimum entre les bardeaux doit être entre 3 et 6cm suivant la largeur de la pièce utilisée. Les artisans choisissent différentes largeurs de bardeau et réalisent une pose de bardeau à joints brouillés, c'est à dire que les joints ne sont pas alignés. Une taille des bardeaux à la hachette est également faite lorsque des noues, rives ou arêtes sont réalisées.

Suivant les régions et les artisans, la pose de bardeau s'effectue ensuite différemment:

  • il est possible de l'agrafer ou de le clouer directement sur le support (voliges ou liteaux). Les pointes utilisées sont alors choisies avec attention : elles doivent être fines pour éviter l'éclatement du bois et doivent être galvanisées, en inox, laiton ou cuivre afin d'éviter leur oxydation toujours nuisible au bois. Il ne faut pas fixer le clou dans le creux d'un bardeau où l'eau pourrait stagner mais il faut le clouer sur une surface lisse. Cette méthode est utilisée lorsque la toiture est soumise à des vents fréquents et forts. Elle a cependant l'inconvénient de ne pas être remplaçable facilement lors de la réparation des tuiles de bois détériorées.
  • les bardeaux peuvent aussi être posés en toiture par accrochage sur le liteau. Pour cela, une pointe est enfoncée dans le haut de la tuile, à 3 ou 4cm du bord supérieur et à 2 ou 3cm de l'un des côtés. On utilise cette technique de pose lorsqu'une toiture est bien orientée et n'est pas soumise aux vents forts.

Dans les deux cas, il est nécessaire de laisser un espace minimum de 5mm entre les bardeaux afin de permettre le jeu en cas de variations hygrométriques. Un espace d'une dizaine de millimètres entre les bardeaux et le feutre isolant doit aussi être respecté afin de permettre une aération de la toiture.

Technique de coupe et raccords de toiture

Raccordement d'une couverture en bardeaux avec une paroi maçonnée. Schéma Chantal PONTVIANNE ©
Disposition des bardeaux en arête de toit Schéma de Chantal PONTVIANNE ©
Réalisation d'une noue fermée Schéma Chantal PONTVIANNE©
Faîtage en lignolet d'un toit en bardeauxSchéma de Chantal PONTVIANNE ©

Les bardeaux utilisés en extrémité de toiture en châtaigner impliquent une coupe et une pose spécifique. En voici les caractéristiques :

  • En bas de la toiture, sur la rive d'égout, deux bardeaux sont superposés formant un doublis. Ces deux premières pièces sont toujours clouées à l'aide de deux pointes.Une chanlatte de dimension variable sert de support au premier rang et sa légère courbure en toiture permet d'éloigner la pluie du mur gouttereau.
  • Les rives latérales possèdent un débordement de toiture plus ou moins avancé selon les régions. Il est conseillé de fixer un liteau dans le même sens que les chevrons, sur lequel seront fixées les bardeaux. Cela permettra d'obtenir une meilleure résistance au vent. Les rangs doivent commencer par alternance, avec un bardeau entier puis un demi-bardeau.
  • Les rives en pénétration sont les raccords effectués entre la toiture et un mur ou une cheminée. Des noquets (pièces coudées en métal) servent de pièces jointives entre le toit et une paroi maçonnée. Ces pièces qui une fois couvertes sont invisibles, s'insèrent entre les deux dernières couches de bardeaux qui sont eux-mêmes recouverts de solins métalliques. Ces derniers s'accrocheront au mur par saignée d'encastrement. Le tout peut être recouvert d'un solin de mortier de chaux qui apportera une étanchéité au raccord.
  • Le faîtage en bardeau est réalisé en lignolet, évitant ainsi la prise au vent. Afin que la fixation du faîtage soit optimale, il faut fixer une chanlatte sur chaque versant. Les bardeaux sont ensuite fixés dessus et la rangée de lignolets dépasse de 5 à 7cm pour former un butoir au niveau des rangs de rencontre. L'artisan, qui aura choisi et retaillé avec soin les bardeaux du faîtage, pourra en proposer une double épaisseur appuyée contre le dernier rang du versant opposé. Un feutre pourra également être intercalé entre les bardeaux pour étanchéifier.
  • Les arêtes sont réalisées avec des bardeaux taillés suivant l'angle du toit et dont la jointure est biaise afin d'assurer une bonne étanchéité. Ils sont superposés puis sont fixés avec deux pointes. Il est possible d'y intercaler un feutre isolant pour l'étanchéité.
  • Les noues (arêtes rentrantes) peuvent être réalisée de trois manières différentes. La première, plus facile mais sans doute moins esthétique, consiste à réaliser une noue ouverte avec tuiles biseautées laissant apparaitre une rigole métallique. La deuxième méthode est une noue fermée. Un feutre est installé sur la charpente, dans l'angle rentrant à couvrir, puis est recouvert d'un noquet. Des bardeaux taillés en biais le recouvrent totalement. Cette méthode est plus difficile à mettre en place car le couvreur doit tailler et ajuster les tuiles entre l'angle et la rangée de bardeaux. Il doit d'abord poser un avant dernier bardeau de rang puis les bardeaux de la noue et enfin réaliser leur liaison avec une dernière tuile taillée sur mesure. La troisième méthode est celle de la noue ronde, c'est à dire une couverture de tuiles de bois suivant un arrondi, qui est l'une des plus esthétiques.
Noue ronde en bardeaux de châtaigner Photo Maison Paysannes de France - Sarthe ©

Bibliographie

  • LEONET F. (1995), Regards sur la Haute-Savoie : couvrir en bardeaux de bois, Revue Maisons Paysannes de France, n°,116, 2T, pp.19-23.
  • MAISONS PAYSANNES DE FRANCE, DÉLÉGATION DE LA SARTHE, Restaurer la toiture d'une demeure rurale, 4 décembre 2014, disponible à l'adresse: https://www.maisonspaysannesdelasarthe.fr/?q=node/99
  • PONTVIANNE C. (1991), La couverture en bardeau de bois, Revue Maisons Paysannes de France, n°101, 3T, pp.13-15.
  • PONTVIANNE C. (1991), Le bardeau de mélèze dans la vallée de l'Ubaye, Revue Maisons Paysannes de France, n°101, 3T, pp.16-18.