Octaèdres étoilés dans la Sarthe

Saint-Rémy-du-Val - Octaèdre surplombant une demi-grille en fer forgé avec un chronogramme mystérieux

Saint-Rémy-du-Val - Octaèdre sur un pilier d'entrée de l'ancien presbytère

La Jatterie à Connerré: ces octaèdres campent sur des piliers en briques

La Chapelle-du-Bois - Maison au pilier, dernier vestige du presbytère

« Il se dégage de ces sculptures quelque chose d’indéfinissable » 

=== Définition : === 

L’octaèdre est l’un des 5 corps platoniciens que comptent les polyèdres. C’est donc une figure géométrique hautement symbolique que le philosophe rattachait à l’air. 

Les sculptures qui nous intéressent ici sont des polyèdres appelés « octangle étoilé » ou encore « étoile anticubique » ; un polyèdre composé de deux pyramides à base triangulaire qui s’interpénètrent, souvent complété par de petites étoiles sur les pointes.  

Les polyèdres étoilés repérés dans la Sarthe surmontent des piliers en entrée de propriétés. Ils sont de type « octaèdres étoilés fractals ». L’octaèdre lui-même ne se voit pas : il est caché par les rayons de l’étoile, ce qui ajoute au mystère de l’objet, qui n’est pas seulement beau et rare, mais qui est également puissamment chargé d’une symbolique que seuls des initiés pouvaient entrevoir. 

=== Symbolique : === 

A ces réalisations se trouvent attachées diverses explications : religieuse, ésotérique, mystique qui obligent à dépasser la simple vision rationaliste pour plonger dans un irrationnel foisonnant. Ces sculptures n’étaient elles pas posées sur des piliers pour détourner le danger ? Les pointes étoilées ne ressemblent elles pas à de petites croix, permettant la médiation entre la terre et le ciel ? La forme omnidirectionnelle n’est elle pas signe de plénitude, d’infini et d’équilibre ? 

=== Chefs-d’œuvre de compagnons tailleurs de pierre : === 

Pour réaliser de tels ouvrages, les tailleurs de pierre devaient pratiquer « l’art du trait ». Les Compagnons du Devoir possédaient ce savoir-faire si particulier ce qui explique que  ces sculptures se retrouvent plus fréquemment dans les régions de France où les compagnons étaient nombreux. 

=== Datation : === 

Les octaèdres étoilés, toujours placées en hauteur, le plus souvent sur des piliers de maisons bourgeoises ou de châteaux, sont toujours datés par Henri Calhiol (1) de la fin du 19ème siècle (dates identifiées dans le Sud-ouest de la France: 1858 – 1862 – 1867 – 1869). 

Des octaèdres étoilés fractals dans la Sarthe :

 

La Bazoge: octaèdre en parfait état se détachant sur fond d'azur

- A La Bazoge, à l’entrée d’une maison bourgeoise de la fin du 19^ème siècle; ils sont taillés dans un grès roussard d’excellente qualité et sont dans un état remarquable. 

- A La Jatterie, près de Connerré ; ils accompagnent une très belle maison bourgeoise datée 1779. Ces sculptures, bien que surmontant des piliers en briques assez récents (fin 19^ème ou début 20^ème ?) et d’architecture banale, paraissent plutôt contemporaines de la maison (même pierre calcaire, qualité supérieure à celle des piliers, forte usure). Aurions nous là des octaèdres étoilés antérieurs au 19^ème siècle ? 

- A Saint-Rémy-du-Val, ils surmontent des piliers de facture 18^ème  ou début 19^ème, à l’entrée d’un très beau bâtiment de même époque. Ce bâtiment, appelé prieuré, est situé à côté de la chapelle Notre-Dame-de-Toutes-Aides qui était, depuis le Moyen-Âge, un important lieu de pèlerinage. Côté droit du portail, ne subsistent hélas en fer forgé que les deux derniers chiffres d’une date : 48. 

- A La Chapelle-du-Bois, un pilier surmonté d’un octaèdre étoilé est le seul vestige de l’ancien presbytère. Là encore, la facture paraît hâtive (début du 19^ème ?). 

- Au Mans, quartier de Pontlieue, des octaèdres étoilés très bien conservés encadrent l’escalier d’une belle maison bourgeoise. Ces éléments ne sont pas locaux ; ils ont été récupérés dans le Sud-ouest de la France.