Maisons rurales du Cantal

De Maisons Paysannes de France
Maison paysanne dans le Cantal

Photo Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal ©

Géologie du Cantal

Département du Cantal
Fichier:Carte Cantal.jpg
Carte du Cantal

Dessin Pierre Moreau © 1975

On distingue trois types géologiques dans le Cantal, s’échelonnant de 1855m d'altitude (Plomb du Cantal) à 200m environ (vallée du Lot):

  • Pays volcaniques : plateaux basaltiques du Cézallier et de l'Aubrac ; massif cantalien ("strato-volcan", empilement de laves et projections variées) où s'opposent plateaux de forme triangulaire ("planèzes" de Saint-Flour au Sud-Est et de Mauriac au Nord-Ouest) et vallées glaciaires rayonnantes (parmi lesquelles : Cère, Jordanne, Authre, Doire, Maronne, Mars, Allagnon, Brezons, Goul).
  • Bassins sédimentaires argilo-calcaires : bassins d'Aurillac et de Maurs les plus notables, petit bassin de Massiac.
  • Socle ancien (roches métamorphiques et granites) : la Châtaigneraie au Sud-Ouest et la Xaintrie à l'Ouest, plateaux plus ou moins fortement creusés par les affluents du Lot et de la Dordogne. L'Artense au Nord, plateau modelé par les glaces. La Margeride au Sud-Est, important relief soulevé entre des failles ("horst").

Cette diversité géologique se retrouve dans l'architecture qui ne présentera pas les mêmes caractéristiques suivant sa localisation dans la région. Bien que le type fondamental d'architecture soit commun, on distingue une variété de matériaux locaux employés, dans la mise en œuvre de couvertures ou d'ouvertures.

Caractères généraux du bâti paysan

Architecture

Mur en pierre

Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal ©
L'architecture élémentaire de la maison paysanne (appelée aussi oustal) est encore assez fréquente dans l'Ouest cantalien et sert ainsi d'archétype du bâti dans la région. Située la plupart du temps à l'abri d'un relief, la maison tourne sa façade, seule percée, vers le Sud.

Les murs sont en pierre :

  • dans le massif cantalien : moellons de basalte, de laves diverses et particulièrement de brèche volcanique ; encadrements taillés dans des laves massives (trachy-andésite grise). On note parfois l'emploi direct des prismes hexagonaux de basalte, entrecroisés pour former les arêtiers.
  • dans les pays schisteux : en l'absence de lave ou de granite proches, les encadrements sont en bois. Des maçonneries en colombage, en général réservées à l'étage et alors souvent partielles, apparaissent dans ces derniers pays, en Châtaigneraie (Sud-Ouest) principalement.

Son plan est celui d'un rectangle peu allongé (les dimensions intérieures de la salle unique sont de l'ordre de 7m sur 6m). En façade, sa disposition type serait ainsi : une porte à droite et une petite fenêtre à gauche, cette dernière étant proche de la cheminée (appelée aussi "cantou") elle-même adossée au pignon Ouest. A l'intérieur, cette cheminée dispose soit d'un linteau en bois droit soit d'un linteau en pierres taillées en arc surbaissé.

Salle commune type d'une maison cantalienne avec souillarde et grande cheminée

Dessin Pierre Moreau ©
Souillarde

Maison Paysannes de France, délégation du Cantal ©

La souillarde, petit renfoncement voûté aux étagères en pierre, est caractéristique de la maison de Haute-Auvergne. Elle sert de lieu de réserve ou pour y faire la lessive et renferme une pierre d'évier.

Ce renfoncement intérieur se situe généralement sur le mur gouttereau arrière mais il arrive aussi qu'il soit placée à côté du cantou ou en façade. Le développement de la souillarde est caractéristique : elle devient une véritable pièce, dont la présence se signale davantage à l'extérieur grâce à un toit pyramidal souvent spectaculaire, spécialement dans l'Ouest cantalien.

Le sol de l'habitation peut être en terre battue, en plancher ou en pierre. Sur cette dernière disposition, des dalles plus moins régulières sont posées, ou alors des galets ou petites pierres rectangulaires posées sur chant forment des calades.

Bolet

Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal ©

De l'extérieur, la façade est basse et chapeautée par un toit pentu percé par des lucarnes. Celui de la maison élémentaire est souvent à deux pentes et surmonte directement le rez-de-chaussée composé d'une pièce unique. Certaines habitations possèdent des pignons à redans, témoignage d'anciennes toitures en chaume (dont la plupart ont disparu au cours des années 70). Celles-ci peuvent expliquer le caractère rudimentaire de nombreuses charpentes de ces régions. Elles sont maintenant recouvertes de lauzes ou ardoises qui sont clouées (autrefois fixées par des chevilles en bois) sur des voliges (ou douelles).

Une corniche en pierre en doucine (moulure travaillée en forme de "S") termine un mur gouttereau (en fin de pente de toit). Dans l'Ouest cantalien, la tendance est souvent au débordement du toit vers l'avant, soutenu par des corbeaux en bois plus ou moins travaillés. Cette tendance aboutit au dispositif plus complexe du bolet, avancée du toit soutenue par des poteaux en bois ou en pierre.

La toiture se développe et devient souvent à quatre pentes dans les maisons plus importantes et/ou les plus récentes. Les souches de cheminée sont particulièrement soignées : de plan rectangulaire, en pierre de taille (brèche ou lave massive) avec leurs retraits caractéristiques elles sont emblématiques de l'architecture rurale cantalienne. Des souches arrondies subsistent, considérées comme plus anciennes et de tradition médiévale. Les souches sont moins soignées dans les pays réduits à employer le schiste.

Sur les toits pentus, les lucarnes sont obligatoires. Elles sont soit en pierre au droit du mur, soit en bois et parfois placées à plusieurs niveaux du toit suivant l'importance de la maison. Ces lucarnes sont couvertes de deux ou trois pentes.

Les toitures type sont en ardoises (de Corrèze : Travassac, Allassac) et surtout en lauzes (« tuile de pierre » ou « tuile de pays ») : d'origine métamorphique (schiste et micaschiste, gneiss parfois) et taillées en écaille de poisson. Les lauzes sont aussi d'origine volcanique, aux formes généralement plus irrégulières : phonolite (Nord Cantal), trachy-andésite (coeur du massif) ou basalte en dalles (planèzes).

Les faîtages les plus courants sont en tuile canal. Cependant, il existe encore de remarquables faîtages en pierre, parfois accompagnés de croix et d'épis eux aussi en pierre (dans le Nord Cantal).

Linteau gravé à Saint-Martin-Valmeroux

Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal ©
L'évolution architecturale de cette maison se manifeste par la transformation du plan et l'apparition de pièces supplémentaires. On constate ainsi l'apparition de la «chambre » à côté de la salle commune et la possibilité d'un doublement de la maison en profondeur par l'ajout d'appentis (petit bâti avec toit à une seule pente) à l'arrière. La maison peut également posséder un étage voué à l'habitation, alors desservi par un escalier intérieur perpendiculaire au mur gouttereau.

En Haute-Auvergne, jusqu'au milieu du XXe siècle, on constate également que les linteaux sont parfois gravés ou sculptés d'une date, d'un nom, d'initiales, de citation ou de symboles.

Mobilier

La maison paysanne du Cantal possède un mobilier typique qui renforce la spécificité de son architecture. L'intérieur type comporte une grande table à tiroirs, accompagnée de ses bancs massifs et disposée dans l'axe de la fenêtre. Cette table est surplombée par une planche (la «pau») fixée au plafond par deux montants verticaux : elle sert à ranger à l'abri des rongeurs certains aliments dont le pain.

Deux bancs (dits « de cantou ») sont disposés à l'intérieur et de part et d'autre de la grande cheminée, âme même de l'oustal.
Banc coffre

Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal ©
Près de la souillarde, se trouve souvent une fontaine-lavabo en cuivre, fixée à un meuble-support.

Le mur du fond est occupé par une pendule, des armoires et surtout par une enfilade de lits clos, ou lits-wagons. Ces lits ferment par des rideaux et non des portes, contrairement aux lits bretons. Ils sont précédés chacun de leurs bancs-coffre, parfois d'un seul tenant pouvant atteindre jusqu'à 5m de long.

L'intérieur était éclairé par des lampes à huile, dont une suspendue au-dessus de la table par le « porte-chaleil », sorte de crémaillère en bois plus ou moins ouvragée.

Bâtiments annexes

Le principal bâtiment annexe de ces maisons paysannes est la grange-étable, élément majeur du patrimoine rural cantalien. Cette grange soit fait corps avec l'habitation (Est cantalien), soit en est séparée (cas de l'Ouest cantalien). La plus ancienne grange du Cantal se trouve notamment à Bélières de Saint-Cernin s'il on en croit son linteau du porche, gravé "1595". Elle a notamment pu être conservée grâce au remplacement de son toit de chaume par une couverture en tôle en 1939[1].

Ce bâti est cependant menacé car trop peu protégé.

Dans les deux cas, sa structure est la même :

  • l'étable, accessible par le mur gouttereau ou par le pignon, occupe l'ensemble du rez-de-chaussée, les vaches étant typiquement disposées de part et d'autre d'un couloir central. Au fond de la grange un local est réservé aux veaux : à chaque traite, ceux-ci sont traditionnellement appelés près de leur mère, la vache Salers ne donnant son lait que si la traite a été amorcée par son veau.
  • la grange occupe l'ensemble de l'étage : elle est accessible soit par une rampe (appelée aussi « montade » en Auvergne), soit directement si la dénivellation du terrain le permet. Selon la position du bâtiment, perpendiculaire ou parallèle aux courbes de niveau, la porte de la grange se situe soit au pignon, soit sur le mur gouttereau arrière.

Cette grange-étable auvergnate s'oppose nettement par sa structure à sa voisine limousine (caractérisée par une division transversale tripartite de son volume). Par sa capacité à accueillir davantage de bétail et à engranger davantage de fourrage, elle a constitué un modèle culturel conquérant par rapport à la grange limousine.

Les vastes granges auvergnates avec leurs charpentes remarquables et leurs portes souvent surmontées dans l'Ouest cantalien de clochetons pyramidaux, s'affirment comme les chefs-d’œuvre de l'architecture rurale en Haute-Auvergne.

Bibliographie