Four à chanvre dans la Sarthe
Le four à chanvre est une construction qui servait à la dessiccation du chanvre. Cette étape de séchage suivait celle du rouissage (pourissement dans l'eau des parties tendres et conservation de la fibre) et s'effectuait avant le broyage et le peignage de la fibre de chanvre restante.
On retrouve ce type de bâti dans les régions où l'on cultivait le chanvre au XIXème notamment en Sarthe et sur une petite partie de l'Orne, de la Mayenne et de l'Indre-et-Loire.Le Haut-Maine jusqu'au XVIIIème siècle ne se distingue pas particulièrement par la culture du chanvre ; cette activité est également présente dans de nombreuses autres régions et les chanvres produits localement ne sont pas toujours de bonne qualité. Ce n'est qu'à la fin du XVIIIème siècle que le Haut-Maine va devenir une grande région productrice. Au XIXème siècle, alors que cette culture marque le pas un peu partout, la Sarthe au contraire va mieux que résister. Elle en fait une spécialité jusqu'à devenir le premier département producteur. Cette période de prospérité pour les campagnes mancelles durera jusqu'au début du XXème siècle.
C'est ce qui explique la forte présence de fours à chanvre en Sarthe. Dans certains secteurs, chaque ferme avait son propre four, souvent un peu à l'écart de l'habitation pour éviter les émanations de fumée.Sommaire
Architecture
Les fours à chanvre peuvent être de plan quadrangulaire ou cylindrique.
Ils sont très souvent accompagnés d'un petit hangar appelé loge (ou brairie) destiné au travail du brayage. Il n'est pas rare qu'ils soient à proximité immédiate d'une mare (le doué) ou d'une excavation spécialement aménagée (le routoir) qui servait au rouissage.
Le four type a un diamètre moyen de 3 à 4m pour une hauteur de 4 ou 5m. La toiture déborde du bâti afin de protéger l'enduit et est couverte de tuiles ou d'ardoises. Si elle est rayonnante, elle dispose d'une pente du toit d'un peu plus de 45°.
Une collerette de zinc ainsi qu'un épi de faîtage protègent le poinçon du toit qui n'est pas couvert.
Ces bâtiments sont généralement installés sur une déclivité permettant l'accès de plain-pied aussi bien au rez-de-chaussée qu'au niveau supérieur.
L'intérieur donnant sur deux niveaux est séparé par un plancher à claire-voie ou une grille situé à 1,60m du sol :
- Au rez-de-chaussée, sur un sol dallé, se situe la chambre de chauffe où l'on installait un brasier à coke. Le foyer est construit en briques.
- Au premier niveau, donnant sur le dessus de la claie, se trouvait la chambre à chanvre d'une hauteur moyenne de 2,80 à 3m.
La chambre du chanvre peut être fermée par un plafond en solives recouvertes de chaux et d'un assemblage de moellons qui s'oppose au départ de chaleur.
Les fours plus modestes ne disposent que d'une porte permettant à la fois l'ajout de bois dans le foyer et la charge du chanvre sur la grille. (1)
Matériaux et diversité architecturale
Les fours ronds sont les plus courants (66% des effectifs), mais les fours carrés ne sont pas rares. Les couvertures sont très variées: en charpente (de forme conique) couvertes de tuiles ou d'ardoises, en maçonnerie (dôme aplatit) ou avec une simple dalle de béton. Il existait autrefois des fours couverts de terre et de végétation; ils ont tous disparu.
Les murs peuvent être en maçonnerie de pierres, en briques ou en "terrasse" (bauge). Ils sont le plus souvent enduits au mortier de chaux.
La répartition des fours dans la Sarthe
La majorité des fours à chanvre se trouvent dans le quart nord-ouest du département: dans le Saosnois aux riches terres agricoles, autour de Fresnay-sur-Sarthe, dans la Champagne Mancelle (Loué, Conlie) et au Nord du Mans.
A cela il faut ajouter le Belinois, petite région fertile au Nord du Mans où les fours à chanvre, souvent quadrangulaires, parfois doubles, sont difficiles à identifier.
Fonctionnement
Les bottes de chanvre sont enfournées par la porte la plus haute et posées sur la claie. La porte basse donne quant à elle sur le foyer où l'on ajoute des fagots que l'on allume. Le chanvre est chauffé pendant toute une nuit à une température de 60°C.
La fumée passait par le plancher puis par les fibres de chanvre avant de s'échapper par la couverture ou, selon les régions, par des lucarnons dans les murs.
Reconversions actuelles possibles
Ces bâtiments abandonnés ou détruits aujourd'hui seraient pourtant des lieux idéaux pour les transformer en dépendances. De par leur bonne ventilation, il est possible de les transformer en séchoir à linge, en buanderie, en fumoir ou encore en local de jardinerie.
Bibliographie
- CAUE 72, Architectures rurales en Sarthe, Saosnois, dépliant n°9, 1991.
- ETIENNE-STEINER C., Variétés rurales, Revue Vieilles Maisons Françaises, n°115, décembre 1986, p.49.
- LES AMIS DE LOUIS SIMON, Le chanvre en Sarthe, Guides Habitants, Editions Alain Sutton, Collection : Provinces mosaïques, 2012.
- MENIL A., La maison rurale dans le Maine et le Haut-Anjou, Les cahiers de construction traditionnelle, Editions CREER, p.20.
- MOUY M., Les îles de Basse-Touraine : Pays de chanvriers, Chapitre 1 : Le pays, la culture du chanvre, Revue Maisons Paysannes de France, n°72, 2T, 1984, p.4-5.
- NIQUEUX D., A la découverte des villages de France : Stage d'étude à Vivoin (Sarthe), Revue Maisons Paysannes de France, n°58, 4T, 1980, p.20-21.
- TROTEREAU J., Les fours en campagne, Revue Détours, n°13, 1994, p.106.