Annexes de l'habitat rural du Cantal

De Maisons Paysannes de France
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L'habitat rural du Cantal présente une grande diversité architecturale suivant son emplacement dans le département. Il s'accompagne généralement d'annexes à l'aspect tout aussi différent et qui sont des riches témoins du patrimoine rural cantalien.
Exemple de bloc-à-terre, étable accolée à une habitation avec rampe d'accès (ou montade) vers la grange.
Construction commune en Planèze

Croquis Pierre Moreau © 1974
Parmi eux se trouvent des bâtiments construits pour les animaux comme des étables, des porcheries, des poulaillers et pigeonniers mais également des bâtis pour le stockage ou les commodités du quotidien. Une habitation peut notamment s'accompagner d'une grange (liée à l'étable) , d'un four à pain, d'une fontaine ou d'un puits, ainsi que d'un sécadou (séchoir à châtaignes).

Ces bâtis peuvent se retrouver parfois concentrés au sein d'un couderc, parcelle communale herbée servant aux activités agricoles et de lieu de pacage, notamment pour les porcs. Fédérateur dans les relations d'un village, le couderc était entouré d'un muret en pierre et regroupait souvent un ou plusieurs points d'eau (fontaine, lavoir, abreuvoir), une croix, un four partagé et un séchoir à châtaignes[1].

Les matériaux utilisés sont généralement les même que ceux utilisés pour les habitations paysannes et leurs abords : murs en pierre sèche, enduits (quand il y en a) à la chaux aérienne et au sable de pays, bois de la région (châtaigner, frêne ou sapin), toiture en pierre, ardoise, tuile de terre cuite ou chaume.

Bâtis pour les animaux

Grange de Bélières de Saint-Cernin datant de 1595, conservée en partie grâce à sa toiture en tôle.

Photo Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal ©
Détail du linteau de la grange Bélières de Saint-Cernin, gravé 1595

Photo Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal ©
Porcherie ou poulailler située dans la Planèze

Deux déversoirs sont situés de part et d'autres des portes en bois. Une porte est percée en partie haute et permet l'aération de la loge. La toiture est en lauzes et les murs en moellons.

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal
Système de déversoir du lait vers une auge en pierre

Croquis de Claude Gauthier ©
Pigeonnier de la Prade à Vic-sur-Cère

Photo Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal ©
Four à pain dans le Cantal

Photo Henri Sabatier ©
Four banal dans le Cantal

Schéma de Claude Gauthier © 1990

Grange étable

Le Cantal étant une région réputée pour ses élevages de vaches "Salers", il n'est pas surprenant que son territoire possède de nombreuses granges étables. Bien qu'elles soient menacées car peu protégées, on en trouve encore de très anciennes notamment celle de Bélières de Saint-Cernin qui daterait de 1595, s'il on en croit le linteau gravé de son porche . Ce bâti a notamment pu être conservé grâce au remplacement de son toit de chaume par une couverture en tôle en 1939[2].

La grange étable peut être contigüe à l'habitation dans l'Est cantalien (Cézallier, Planèze, Margeride) ou en être séparée dans l'Ouest cantalien (Xaintrie, bassin d'Aurillac et Châtaigneraie). Elle peut aussi être perpendiculaire à l'habitation au Sud-Est du département (Aubrac), mais cette disposition, plus rare, reste une exception.

On appelle bloc-à-terre une construction regroupant plusieurs fonctions sous un même toit. Dans le cas d'une habitation accolée à une grange étable, le logis est plus modeste que la partie réservée aux animaux.

Dans la plupart des cas, la structure de cette construction est la même:

  • l'étable, accessible par le mur gouttereau ou par le pignon, occupe l'ensemble du rez-de-chaussée, avec les vaches installés de part et d'autre d'un couloir central. Au fond de la grange un local est réservé aux veaux pour qu'à chaque traite, ceux-ci soient appelés près de leur mère, la vache Salers ne donnant son lait que si la traite a été amorcée par son veau.
  • la grange occupe l'ensemble de l'étage : elle est accessible soit par une rampe (appelée aussi « montade » en Auvergne), soit directement si la dénivellation du terrain le permet. Selon la position du bâtiment, perpendiculaire ou parallèle aux courbes de niveau, la porte de la grange se situe soit au pignon, soit sur le mur gouttereau arrière.

La grange étable auvergnate s'oppose à la structure de sa voisine limousine (caractérisée par une division transversale tripartite de son volume). Par sa capacité à accueillir davantage de bétail et à engranger davantage de fourrage, elle a constitué un modèle plus imposant par rapport à la grange limousine.

Les vastes granges auvergnates avec leurs charpentes remarquables et leurs portes souvent surmontées dans l'Ouest cantalien de clochetons pyramidaux, s'affirment comme les chefs-d’œuvre de l'architecture rurale en Haute-Auvergne.

Porcherie et poulailler

Il est encore possible de trouver des constructions qui ont servi d'habitat pour les poules ou cochons à proximité de maison rurale cantalienne, bien qu'elles n'abritent plus d'animaux depuis la fin des années 1970.

Ces bâtis, dont l'aspect rappelle celui de maisonnettes, sont appelés "loges" et sont parfois restaurés pour un autre usage que celui d'origine. Le soin qui était apporté à ces constructions est le même que celui apporté aux maisons rurales cantaliennes et témoigne de l'importance des élevages, source de richesse des paysans. C'est pourquoi des matériaux similaires étaient utilisés et l'architecture comporte des éléments bien étudiés pour le confort de l'animal.

A l'intérieur de la loge pour les cochons, le sol était dallé avec des galets et disposait d'une auge en pierre. Elle était reliée à l'extérieur par une canalisation dans laquelle le paysan y versait du lait, base de l'alimentation du cochon.

Les animaux étaient abrités au rez-de-chaussée de la loge tandis que la paille ou d'autres réserves étaient stockées au premier étage où une lucarne de toit permettait l'aération.

Les portes, souvent à double battants, peuvent comporter une ouverture sur leur partie haute, parfois découpée en forme de trèfle ou de cœur et permettant l'aération du bâti. Les volets sont en bois, souvent à planches larges avec barres d'assemblage horizontales.

La loge peut être aussi entourée d'un muret délimitant une petite cour dans laquelle les poules ou cochons pouvaient sortir tout en étant surveillés.

Pigeonnier

Bien que peu présents en Auvergne, il existe des pigeonniers dans le Cantal réalisés avec des matériaux locaux, témoins d'une architecture propre au département.

Le plus célèbre est le pigeonnier de la Prade, situé sur la commune de Vic-sur-Cère. Ce bâtiment, de forme hexagonale et aux murs en maçonnerie, repose sur un plancher en bois. Il est juché sur six piliers en pierre chanfreinés. Sa porte ainsi que le cadre de ses ouvertures en façade sont en bois.

La couverture de ce pigeonnier, très pentue, est couverte de lauzes de schiste et percé sur un pan par une lucarne.

Four à pain

Sécadou en Châtaigneraie

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal.
Plancher à claire-voie à l'intérieur d'un sécadou.

Photo Henri Sabatier © Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal.

Le four à pain est une construction qui est encore présente dans le paysage cantalien bien qu'elle soit souvent menacée de ruine. Il est le témoignage d'une vie quotidienne et de traditions au sein d'un village et fait aussi partie du patrimoine « au même titre qu'une église et un château »[3]. Sa restauration est donc essentielle.

Au Moyen-Âge, le four était un élément essentiel dans un village. Un seigneur prenait en charge sa construction et son entretien et le mettait à disposition de tout habitant de la seigneurie. Ils venaient y cuire leur pain et payaient en contrepartie une "banalité", indemnité en nature (volaille, grain, bétail,...) versée au seigneur. C'est ce droit qui est à l'origine du nom "four banal".

A partir de la Révolution française, le système de banalité fut abandonné et certaines familles aisées se sont fait construire leur propre four.

Construit en pierres et recouvert de larges lauzes, le four est bien souvent trapu. Il peut être accolé à l'habitation ou peut en être séparé et se situe souvent à proximité d'une source ou d'un ruisseau. Son aspect ressemble à celui d'une petite chapelle en abside, notamment par sa forme en "cul-de-four".

Les dimensions de la sole (paroi inférieure plate d'un four) sont assez régulières avec en général un diamètre de 2,30m pour une voûte surbaissée d'une hauteur de 1m. Cette voûte est formée avec une pierre centrale hexagonale autour de laquelle s'organisent des pierres taillées. Le roche utilisée pour le four est un tuf, qui a la capacité de garder la chaleur longtemps.

Sécadou

Le sécadou est le nom donné au séchoir à châtaignes, construction caractéristique de la Châtaigneraie dans le sud-ouest du Cantal. Il s'agit d'un petit bâtiment rectangulaire à un étage souvent en schiste ou en granit situé à proximité d'une maison ou d'une ferme, sur un couderc ou bien près d'un bois.

A l'intérieur, un feu sans flamme est maintenu allumé au sol. Au dessus, à hauteur d'homme, est installé un plancher à claire-voie sur lequel les châtaignes fraîches sont réparties. Elles sont ensuite exposées longuement à la chaleur afin d'être séchées.

Buron

Buron dans l'Aubrac cantalien

Photo Henri Sabatier ©
Maisons Paysannes de France, délégation du Cantal
Les burons sont des petites constructions isolées, disséminées dans le paysage du nord-Cantal. Il s'agit d'une "dépendance éloignée de la ferme principale"[4] qui servait d'habitat saisonnier aux buronniers de mai à octobre pendant l'estive. Un buron abritait généralement trois personnes : un vacher, un aide-vacher et un pâtre.

Cette habitation saisonnière a connu différentes évolutions architecturales depuis le XVIIIème siècle. A l'origine grossière, au trois-quart enterrée et recouverte de lourdes lauzes, le buron est devenu dès le XXème siècle plus haut et vaste, couvert d'ardoises.

Cet abri dispose généralement d'une pièce principale qui sert de cuisine et de laiterie. Cette pièce est éclairée faiblement par une lucarne et la porte d'entrée. Dans le prolongement de la pièce, une cave voûtée sert à l'affinage du fromage.

Quand le buron disposait d'un étage, il était occupé par les veaux. Dès le XIXème siècle, le vacher, le boutiller et le pâtre s'établirent dans cette pièce accessible de plain-pied par l’extérieur, afin d'éviter l'atmosphère humide de la fromagerie du bas.

Une soue aux cochons était parfois accolée au buron.





Références

  1. CAUE du Lot, Les villages & hameaux à coudercs, un emblème caussenard. Fiche pratique, pp.1-4. Disponible à l'adresse : http://www.caue-mp.fr/espace-ressources/villages-et-hameaux-a-coudercs.html Bien que cette fiche pratique soit réalisée par le CAUE du Lot, elle décrit les caractéristiques d'un couderc, forme villageoise particulière, présente également dans le département du Cantal.
  2. ARCHIVES DU CANTAL, Le canton de Saint-Cernin et son patrimoine, disponible à l'adresse:http://archives.cantal.fr/?id=551
  3. "Il serait souhaitable que les fours banaux et privés soient restaurés. Ils font partie du patrimoine au même titre qu'une église et un château. Ils ont joué leur rôle dans les villages et ont fait partie de la vie quotidienne". GAUTHIER C. (1990), Le four banal dans le Cantal, Revue Maisons Paysannes de France, n°98, 4T, p. 17.
  4. MOREAU P. (1977), Les burons du Cantal. Revue Maisons Paysannes de France, n°79, pp. 24-27. Cet article de Pierre Moreau relate sa visite d'un buron alors occupé par trois fermiers. Il explique comment se déroule leur journée, de la traite des vaches, à la fabrication du fromage, en passant le pâturage des vaches. Sont aussi décrits les différents espaces qui forment le buron.

Bibliographie

  • CAUE du Lot, Les villages & hameaux à coudercs, un emblème caussenard. Fiche pratique, pp.1-4. Disponible à l'adresse : http://www.caue-mp.fr/espace-ressources/villages-et-hameaux-a-coudercs.html
  • DÉLÉGATION MAISONS PAYSANNES DE FRANCE DU CANTAL (2002), Fermes et burons, Revue Vieilles Maisons Françaises, n°194, pp. 42-45.
  • FAURE B. (1994), D'anciennes dépendances agricoles restaurées en micro-gîtes, Les sécadous du Cantal, Revue Restaurer sa maison, n°8, pp.16-17.
  • FIRBAL D. (1999), "Logés" comme des cochons, Revue Maisons Paysannes de France, n°134, 4T, pp. 28-29.
  • GAUTHIER C. (1990), Le four banal dans le Cantal, Revue Maisons Paysannes de France, n°98, 4T, pp. 14-17.
  • GAUTHIER C. (1994), Regards sur le Nord Cantal : architecture et vie dans les hautes vallées du Nord Cantal, Revue Maisons Paysannes de France, n°112, 2T, pp.6-11.
  • MAISONS PAYSANNES EN AUVERGNE, DÉLÉGATION DU CANTAL (2002), L'âme du pays : Comment restaurer une maison cantalienne, Revue Vieilles Maisons Françaises, n°195, pp. 56-59.
  • MOREAU P. (1974), Les anciennes maisons paysannes du Cantal, Revue Maisons Paysannes de France, n°35bis, 3Tbis, pp. 8-9.
  • MOREAU P. (1977), Les burons du Cantal. Revue Maisons Paysannes de France, n°79, pp. 24-27.